Commentary on Political Economy

Wednesday 3 November 2021

 Une campagne du Conseil de l’Europe célébrant « la liberté dans le hijab » retirée sous la pression de la France

Il aura suffi de quelques heures sur les réseaux sociaux avant qu’une avalanche de réactions politiques déferle. Une campagne célébrant la diversité et « la liberté dans le hijab » lancée par le Conseil de l’Europe, a en effet déclenché de vives critiques en France mardi 2 novembre, conduisant l’organisation, vigie des droits de l’homme sur le continent, à la retirer le soir même.


La campagne du Conseil de l’Europe.

La campagne du Conseil de l’Europe. CONSEIL DE L'EUROPE

C’est précisément le message en anglais, accompagnant les portraits de plusieurs jeunes femmes voilées sur une seule moitié du visage, affirmant « beauty is in diversity as freedom is in hijab » (« la beauté est dans la diversité comme la liberté est dans le hijab »), qui est à l’origine des réactions de figures politiques tant à l’extrême droite qu’à gauche du champ politique français et de l’intervention du gouvernement.


La France avait « fait part de sa désapprobation extrêmement vive »

Diffusée depuis jeudi 28 octobre, la campagne lancée par le Programme pour l’inclusion et la lutte contre les discriminations du Conseil de l’Europe et cofinancée par l’Union européenne (UE) était jusqu’ici passée inaperçue.


Au sein du gouvernement, c’est la secrétaire d’Etat chargée de la jeunesse, Sarah El Haïry, qui a affirmé, après le retrait du post de la campagne par le Conseil de l’Europe mardi soir sur LCI, que la France avait « fait part de sa désapprobation extrêmement vive » permettant par « ses réseaux diplomatiques » justement « le retrait de cette campagne dès [mardi] ».


Au parti Les Républicains (LR), la campagne a généré de fortes réactions. La candidate à la présidentielle Valérie Pécresse, également présidente de la région Ile-de-France, a fait part dans un tweet de sa « stupeur », estimant que le voile n’était « pas un symbole de liberté mais de soumission ». Son concurrent à l’investiture du parti pour la présidentielle de 2022, Eric Ciotti, député des Alpes-Maritimes, a dénoncé une « promotion du voile islamique » et une « négation de nos racines judéo-chrétiennes ». Le chef de file des sénateurs LR, Bruno Retailleau, a quant à lui estimé que le Conseil de l’Europe promouvait « ouvertement la soumission aux mœurs islamistes ».


Les tweets « ne représentent pas la position du Conseil de l’Europe »

La campagne a également fait réagir à gauche, l’ancienne ministre des droits des femmes et soutien à la candidature présidentielle d’Arnaud Montebourg, la sénatrice socialiste Laurence Rossignol estimant dans un post que « rappeler que les femmes sont libres de porter le hijab (dans le respect des lois de chaque état membre, en France celle de 1905 et 2004) est une chose. Dire que la liberté est dans le hijab » revient à « en faire la promotion ». L’ancien premier ministre et ex-membre du PS, Manuel Valls, a, lui, jugée la campagne de lutte contre les discriminations « choquante, ahurissante et dangereuse ».


A l’extrême droite elle a déclenché un tollé. Marine Le Pen, candidate du Rassemblement national (RN), a réagi par un tweet en début d’après-midi : « Cette communication européenne en faveur du voile islamiste est scandaleuse et indécente. C’est quand les femmes retirent le voile qu’elles deviennent libres, pas l’inverse ! » Pour le député souverainiste Nicolas Dupont-Aignan, qui s’exprimait également sur Twitter, « ceci n’est pas une campagne de propagande des Frères musulmans mais du Conseil de l’Europe ». Le polémiste Eric Zemmour, probable candidat à la présidentielle, a, lui, dénoncé un « djihad publicitaire » et affirmé que « l’islam est l’ennemi de la liberté ».


« Ces tweets ont été retirés et nous allons réfléchir à une meilleure présentation de ce projet », a confirmé dans un communiqué transmis à l’Agence France-Presse le Conseil de l’Europe, l’organisation paneuropéenne basée à Strasbourg. Ils « faisaient partie d’un projet conjoint » du Conseil et de l’Union européenne « dont l’objectif était de sensibiliser à la nécessité de respecter la diversité et l’inclusion et de combattre tout type de discours de haine », a justifié le Conseil d’Europe. Les tweets « reflétaient les déclarations faites de manière individuelle par des participants dans l’un des ateliers du projet et ne représentent pas la position du Conseil de l’Europe ni de sa secrétaire générale », Marija Pejcinovic Buric, a encore assuré l’instance.

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