Commentary on Political Economy

Wednesday 20 March 2024

My voluminous studies on the negatives Denken (negative thought), from Hobbes through Schopenhauer and Nietzsche to Weber and Heidegger and the Austrian School of Economics, have led me to identify conflict as a constant in human affairs. - Which is what this piece on polemology or military affairs brings prepotently to the fore of discussion and relevance now that the last delusions of world peaceniks are being exposed for what they always were: - mere pitiful hallucinations.



L’armée de terre se tient prête

A l’heure où les foyers de crise se multiplient, la France, nation-cadre de l’OTAN, a des atouts majeurs. Outre la dissuasion nucléaire, elle dispose de forces entraînées et interopérables avec les armées alliées, explique le chef d’état-major de l’armée de terre

Pierre Schill

Le début de l’année 2024 est placé sous le signe des tensions internationales. Les foyers de crise se multiplient et portent en eux des risques d’engrenage ou d’extension. Une telle période invite à la réflexion : comment agir tout en adaptant l’armée de terre aux missions de demain ? En tant que chef d’état-major de l’armée de terre, mon objectif est que la puissance démontrée par nos forces infléchisse les tendances, contribue à dénouer des conflits et crée des solidarités, qu’elle dissuade les attaques contre la France, sa population, son territoire et ses intérêts.

Regardons le monde de manière clinique. Plusieurs décennies de paix, émaillées de déploiements limités de corps expéditionnaires dans des missions de gestion de crise, ont conduit les sociétés occidentales à sous-estimer la réalité des rapports de force et des volontés de puissance. Les guerres qui se déroulent sous nos yeux nous poussent à nous interroger sur l’espoir qui était aussi une ambition portée depuis la fin de la guerre froide : marginaliser la guerre jusqu’à la rendre illégale ; focaliser les armées sur la gestion de crise ; écarter la violence. Le projet d’un ordre mondial reposant sur la souveraineté des Etats, le droit international et le règlement des différends par la négociation est présenté comme contingent et occidental, voire battu en brèche. A rebours des aspirations pacifiques des pays européens, les conflits qui s’installent aux marches de notre continent témoignent moins du retour de la guerre que de sa permanence comme mode assumé de résolution des conflits. C’est un constat qu’il faut partager avec nos concitoyens.

Analyser les conflits est riche d’enseignements. Sur le terrain, le retour de la violence guerrière s’impose en miroir de l’affaiblissement des règles internationales. Cette violence guerrière mute avec le développement technologique. Le fantasme d’un combat moderne, mené intégralement à distance grâce aux nouvelles technologies, s’est dissipé. Les nouvelles formes de conflictualité s’ajoutent aux anciennes sans les remplacer : la guerre électronique n’est pas exclusive de corps-à-corps dans les tranchées ; les attaques cyber de duels d’artillerie ; les manipulations informationnelles de combats urbains maison par maison ; les missiles hypervéloces de frappes de drones à bas coût.

Les conflits actuels amènent à reconsidérer la notion de volume de force. Le temps où l’on pouvait infléchir le cours de l’histoire avec trois cents soldats est révolu. Il n’y a plus de « petites guerres » tant l’accès à certaines technologies de pointe s’est démocratisé : les milices houthistes, appuyées par l’Iran, en donnent un exemple en contestant la libre circulation en mer Rouge avec des missiles antinavires de haute technologie.

Face aux rapports de force et aux nouvelles formes de guerre, la France possède des atouts majeurs. Du fait de sa géographie et de l’état de prospérité au sein de l’Union européenne, aucun adversaire ne menace ses frontières métropolitaines. La contestation de la souveraineté des territoires français hors de l’Hexagone reste marginale. La dissuasion nucléaire sanctuarise ses intérêts vitaux.

Pourtant, la France n’est pas à l’abri des tensions qui se manifestent partout dans le monde. Elle a des responsabilités internationales. Elle a des intérêts et des territoires dans toutes les aires géographiques. Elle est liée par des accords de défense à des Etats exposés à des menaces majeures. Pour se prémunir d’agressions à son égard et défendre ses intérêts, l’armée française se prépare aux engagements les plus durs, le fait savoir et le démontre – si vis pacem, para bellum (« si tu veux la paix, prépare la guerre »).

Montée en gamme

La solidarité stratégique avec nos alliés, principalement en Europe et au sein de l’OTAN, impose à la France de disposer de forces entraînées et interopérables avec les armées alliées. La dissuasion nucléaire n’est pas une garantie universelle : elle ne prémunit pas d’affrontements qui demeureraient sous le seuil des intérêts vitaux. L’armée de terre intègre cette donne stratégique. Parce que l’on change d’échelle, la crédibilité militaire s’exprime par la réactivité en matière de projection de force et la capacité à commander une opération d’envergure accrue.

La France a la capacité d’engager en coalition une division, soit environ 20 000 hommes, dans un délai de trente jours. Elle se dote des moyens de commander un corps d’armée en coalition, soit jusqu’à 60 000 hommes, en agrégeant une division française et des capacités nationales du haut du spectre militaire à une ou plusieurs divisions alliées. L’état-major de corps d’armée est la structure indispensable pour diriger des opérations terrestres d’intensité variable, depuis des missions de gestion de crise ou de réassurance jusqu’à un engagement de haute intensité. Il est l’outil d’une puissance capable d’entraîner des partenaires ; l’instrument diplomatique et militaire qui autorise la France à s’engager de manière autonome comme nation-cadre au sein de l’OTAN, comme au sein d’une coalition ad hoc.

La montée en gamme vers des moyens de commandement plus performants et des capacités de déploiement plus importantes marque la volonté militaire de peser demain dans le jeu des puissances. Etre nation-cadre répond à la vocation d’une France « puissance d’équilibres et d’entraînement » : conserver sa liberté d’action, prendre la tête d’une opération et affirmer ses vues dans le cadre d’une coalition. Cette ambition est au cœur de la crédibilité française dans l’OTAN, au sein de l’Union européenne, comme vis-à-vis de nos alliés, quels qu’ils soient. Elle s’inscrit dans la grammaire de la dissuasion en offrant des marches supplémentaires avant que soient menacés nos intérêts vitaux ; elle témoigne d’une détermination de nature à décourager un adversaire éventuel pour « gagner la guerre avant la guerre ».

Le temps n’est plus à la seule analyse des conflits qui nous entourent. L’armée de terre s’adapte pour assurer la sécurité des Français et contribuer à celle de leurs alliés, principalement européens. Elle est engagée dans une vaste transformation qui renforce ses capacités et durcit son organisation. Dans ses villes de garnison, en exercice ou en opération, l’armée de terre incarne la force et les valeurs de la nation. Elle est fière qu’une part importante de la jeunesse rejoigne ses rangs. Elle se tient prête. Quelles que soient les évolutions de la situation internationale, les Français peuvent en être convaincus : leurs soldats répondront présent.

Pierre Schill est général d’armée, chef d’état-major de l’armée de terre

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