Commentary on Political Economy

Saturday 12 December 2020

BOYCOTT EMIRATES ! MORT AUX SALAFISTES! NE VOYAGEZ PAS AUX EMIRATES ! USA MUST NOT SELL F-35s TO UAE!

 

Les liaisons dangereuses des Emirats avec des ennemis déclarés de la France

Les Emirats arabes unis, malgré l’image d’ouverture qu’ils projettent en Europe, entretiennent des relations étroites avec la très anti-française Tchétchénie, ainsi qu’avec les milices salafistes en Libye et au Yémen.

Mohammed Ben Zayed et Ramzan Kadyrov à Abou Dhabi en novembre 2018 (Maxim Suchkov, Twitter)

Les Emirats arabes unis ont, par la voix de leur ministre des Affaires étrangères, apporté un soutien remarqué à la France dans la crise des caricatures, notamment face à la Turquie. Cet appui a conforté tous ceux qui, dans notre pays, voient dans les Emirats un modèle de « tolérance », voire un rempart contre « l’islamisme radical ». C’est oublier bien vite que cette dictature policière ne tolère ni partis, ni élections et que seulement 10% des habitants de cette pétromonarchie en sont des citoyens. En outre, malgré l’image d’ouverture cultivée en Europe, les Emirats entretiennent des relations étroites avec la très obscurantiste Tchétchénie et soutiennent, en Libye et au Yémen, des milices salafistes d’une extrême brutalité.

LE PRESIDENT TCHETCHENE A L’HONNEUR A ABOU DHABI 

Ramzan Kadyrov, que Vladimir Poutine a placé à la tête de la république russe de Tchétchénie depuis 2007, a été de loin le dirigeant musulman le plus virulent contre la France durant la polémique sur les caricatures. Il a en effet surpassé dans l’outrage le président Erdogan en accusant Macron d’être le « chef de file du terrorisme » et en encourageant les menaces contre les ressortissants français. Il a même autorisé le rapatriement de la dépouille du bourreau tchétchène de Samuel Paty pour y être enterré « avec les honneurs ». Cela n’a pas paru troubler son grand ami Mohammed Ben Zayed, dit MBZ, le prince héritier des Emirats et le véritable « homme fort » de cette pétromonarchie. Kadyrov est toujours accueilli avec beaucoup d’égards à Abou Dhabi, parfois, comme sur la photo ci-dessus, par des démonstrations d’affection peu protocolaires. Que ce soit à titre officiel, comme président tchétchène ou émissaire de Poutine, ou à titre privé, durant le mois de Ramadan ou pour des compétitions sportives, le tapis rouge est à chaque fois déroulé pour Kadyrov, avec audience de MBZ à la clef.

C’est que les Emirats ont beaucoup investi en Tchétchénie, entre autres par un fonds Zayed, du nom du défunt fondateur de la fédération émiratie. Peu importe à Mohammed Ben Zayed que l’Islam d’Etat imposé par Kadyrov en Tchétchénie soit obscurantiste dans sa légitimation des violences patriarcales à l’encontre des femmes et des homosexuels. L’essentiel pour le maître des Emirats est que Kadyrov s’oppose aussi brutalement que lui à toute forme de démocratisation, d’une part, et aux Frères musulmans, d’autre part. C’est pourquoi il a choisi Grozny, en août 2016, pour y organiser une « conférence islamique mondiale » de définition de l’orthodoxie sunnite. Deux instances basées à Abou Dhabi, le Conseil des sages musulmans, établi deux ans plus tôt, et la fondation Tabah, étaient à la manoeuvre. L’imam de la mosquée égyptienne d’Al-Azhar y participait, ainsi que les grands muftis d’Egypte, de Jordanie et de Syrie, fidèle à Bachar à Al-Assad. Leur hôte était le grand mufti de Tchétchénie, un homme-lige de Kadyrov, qui a récemment incité à s’en prendre aux Français qui auraient le malheur de soutenir Macron.

LE SOUTIEN AUX SALAFISTES EN LIBYE ET AU YEMEN

L’hostilité obsessionnelle de Mohammed Ben Zayed à l’encontre des Frères musulmans l’a conduit à les qualifier de « terroristes » (et à les traiter comme tels aux Emirats) et à leur préférer les salafistes, certes encore plus rigoristes, mais loyalistes envers les pouvoirs en place (la rupture entre Frères musulmans et salafistes intervient en 1990, lorsque l’Arabie saoudite sollicite le déploiement de centaines de milliers de militaires américains sur son sol pour faire face à l’invasion irakienne du Koweït, un déploiement critiqué par les Frères musulmans, dès lors expulsés d’Arabie, et approuvé par les salafistes, qui remplacent dans leurs positions de pouvoir leurs rivaux islamistes alors évincés). Les forces spéciales des Emirats, engagées au sol au Yémen, dans le cadre de l’offensive lancée en 2015 avec l’Arabie, y ont collaboré avec des commandants salafistes. Abou Dhabi a même veillé à ce que l’un d’eux, à Taez, continue d’être soutenu militairement et financièrement, malgré son inscription sur une « liste noire » de terroristes recherchés par les Etats-Unis, du fait de sa collaboration avec la branche locale d’Al-Qaida.

En Libye, Mohammed Ben Zayed été le plus ferme soutien du « maréchal » Haftar, le maître de la Cyrénaïque, dans les deux guerres civiles qu’il a déclenchées en 2014 et 2019 pour tenter, en vain, de s’emparer de l’Ouest du pays. A la différence de la Russie, de l’Arabie et de l’Egypte, les autres appuis d’Haftar, les Emirats cautionnent activement la collaboration entre l’auto-proclamée « Armée nationale libyenne » et les milices salafistes. Leur chef spirituel, Rabi al-Madkhali, a , depuis l’Arabie saoudite où il réside, publié en 2017 une fatwa de soutien à Haftar, au motif que les Frères musulmans, actifs dans le gouvernement de Tripoli, seraient « plus dangereux pour les salafistes que les Juifs et les Chrétiens »(sic). Les milices salafistes sont dès lors devenues les troupes de choc d’Haftar, qui a couvert en retour leurs pires excès. Les cheikhs salafistes ont en outre pris le contrôle de nombreuses institutions religieuses, avec l’aval d’Haftar, imposant à la population libyenne concernée un ordre moral particulièrement sourcilleux.

L’adage selon lequel « les ennemis de mes ennemis sont mes amis » semble justifier le troublant compagnonnage d’Abou Dhabi avec les courants les plus agressivement rétrogrades de l’Islam en Tchétchénie, au Yémen ou en Libye. Mais, quelles que soient les considérations géopolitiques qui les sous-tendent, de telles compromissions devraient invalider les prétentions des Emirats à incarner une forme d’Islam des lumières.

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