Commentary on Political Economy

Wednesday 26 January 2022

ATTACK ON UKRAINE IS AN ATTACK ON THE WEST AND OUR VALUES

 « Américains et Européens ont compris qu’au-delà du sort de l’Ukraine, eux aussi sont attaqués »

Chronique. Non, on ne rejouera pas à propos de l’Ukraine la grande fracture occidentale de 2003 sur l’invasion de l’Irak et ses prétendues armes de destruction massive. Il n’y aura pas de remake de la saga du « smoking gun », la fameuse preuve des turpitudes de Saddam Hussein que réclamaient en vain certains Européens aux Etats-Unis. En cette fin janvier 2022, après trois mois de tergiversations sur la nature de la menace russe à l’égard de l’Ukraine, le mot d’ordre est enfin clairement formulé parmi les alliés : unité !


Unité : le message a été répété dans toutes les langues après la réunion en vidéoconférence montée, lundi soir 24 janvier, par Washington pour rassembler les principaux dirigeants européens autour du président Joe Biden.


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L’Elysée s’insurgeait contre les interprétations négatives, notamment dans la presse britannique, d’une phrase du discours du président Macron au Parlement européen sur le rôle des Européens et sur un possible dialogue avec la Russie. Le magazine Der Spiegel rapportait que le chancelier Olaf Scholz avait décliné une invitation de Joe Biden à lui rendre visite à Washington…


« Crise existentielle »

On ferme le ban. Cette semaine, le camp occidental serre les rangs. Le conseiller diplomatique de M. Macron, Emmanuel Bonne, a fait un aller-retour à Washington vendredi pour « échanger sur la situation sur le terrain » avec son homologue Jake Sullivan et, depuis, l’Elysée n’évoque plus que des « nuances » dans l’analyse. On s’y dit désormais « satisfaits du partage de l’information » avec les Américains : « il y a une coordination, c’est clair ».


Même si les Britanniques maintiennent des positions « très alarmistes », on fera ce qu’il faut pour rester « en phase ». Les dirigeants de l’Union européenne (UE), ainsi que le président polonais, ont été invités à participer à la réunion virtuelle avec Joe Biden : voilà, l’UE a sa place. Et le porte-parole du département d’Etat américain défie quiconque de déceler « une lueur » de divergence entre les alliés.


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Pourquoi cette unité affichée ? Parce que les Occidentaux ont compris que cette crise dépassait largement le sort de l’Ukraine : eux aussi sont attaqués. Le nouveau défi lancé par Vladimir Poutine depuis fin octobre 2021 porte, cette fois, sur l’ensemble de l’ordonnancement de la sécurité en Europe. Le président russe ne conteste pas seulement le droit des Ukrainiens à choisir leur camp, il veut remettre en cause les acquis de la fin de la guerre froide, remportée par les Etats-Unis et leurs alliés. « Cette crise est existentielle pour nous, elle l’est aussi pour vous, avertit un responsable ukrainien. Si vous laissez passer Poutine cette fois, il ne s’arrêtera pas à Kiev. »


Au pouvoir depuis deux décennies, Vladimir Poutine a ramené dans le giron russe trois ex-républiques de la défunte Union soviétique (Biélorussie, Arménie, Kazakhstan) et occupe militairement des territoires de trois autres (Géorgie, Moldavie, Ukraine). Il a aussi réussi, à la faveur du règlement de la dernière guerre du Haut-Karabakh en 2020, à installer 2 000 soldats russes sur ce qui est considéré comme un territoire de l’Azerbaïdjan. Voilà pour la reconquête de la sphère d’influence russe – qui ne saurait être complète sans le joyau ukrainien.


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Son autre ambition, affirmée ces dernières semaines à travers, notamment, la revendication du retrait de toutes les forces de l’OTAN des pays qui ont rejoint l’Alliance atlantique depuis la fin de la guerre froide, est de revenir à l’ordre européen d’avant 1991. Comme si, finalement, la chute de l’URSS et de son univers n’avait été qu’un mauvais rêve. Cette ambition n’est pas nouvelle. Ce qui l’est, c’est qu’il passe à l’acte.


« Fenêtre d’opportunité »

Pourquoi maintenant ? Parce qu’il a vu « une fenêtre d’opportunité » dans la situation actuelle de l’Occident, analyse Marek Menkiszak, spécialiste de la Russie au Centre d’études orientales (OSW) à Varsovie : « Il voit dans la crise de l’énergie une occasion unique d’exercer un chantage au gaz sur l’Europe. Il pense que l’Occident est plongé dans une crise multiforme, avec des sociétés polarisées, des élites allergiques au risque, une Europe centrée sur ses propres problèmes et que, donc, une éventuelle réaction sera limitée. Il sait que sa politique en Ukraine est un échec, mais il croit qu’il a maintenant la possibilité de changer la dynamique. »


Parallèlement, malgré sa faiblesse économique, Moscou intervient au Moyen-Orient, en Afrique ou dans les Balkans, tout en cultivant ses relations avec la Chine, qui surveille la crise actuelle avec grand intérêt. La Russie, a résumé mardi Emmanuel Macron à Berlin, « est en train de devenir une puissance de déséquilibre aux confins de l’Europe, dans le Caucase et dans quelques autres régions ».

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